Anna Bjurstam est la co-fondatrice de la société suédoise Raison d’Etre. Après 20 ans passés à développer sa chaîne de spas, à conseiller porteurs de projets et chaînes hôtelières, et à analyser ce marché qu’elle connait si bien, elle a rejoint le groupe Six Senses hotels, resorts et spas en février dernier en tant que vice-présidente en charge du spa et du bien-être. Cette nomination fait suite au rachat de l’opérateur hôtelier et de spas par le groupe Pegasus en 2012 et à l’arrivée d’une nouvelle équipe autour de Neil Jacobs, CEO, et de Wolf Hengst, président exécutif, tous deux issus du secteur hôtelier. Un challenge de taille pour cette mère de deux enfants qui partage désormais son temps entre Raison d’Etre et Six Senses, pionnier dans le wellness et le développement durable.

Sa mission : accompagner la nouvelle orientation du groupe et redessiner ses contours dans le domaine du bien-être et du spa. «Nous avons une trentaine de spas à travers le monde. J’en ai déjà visité une douzaine, dont celui de Paris, et j’espère en avoir fait le tour d’ici à la fin de l’année. Cette prise de contact est nécessaire pour comprendre où nous en sommes et comment nous devons évoluer en nous appuyant sur les valeurs de Six Senses. La marque est très impliquée dans le wellness, et le groupe entend investir massivement dans le bien-être», annonce la responsable.

Six valeurs-clé constituent désormais l’ADN de la marque (contre 25 avant !), laissant ainsi une marge de manœuvre bien plus importante à la nouvelle direction : « Local Sensitivity, Global Sensibility », « Responsible and Caring », « Crafted Experiences », « Pioneering Wellness », « Emotional Hospitality » et « Fun and Quirky ». A court-moyen terme, le groupe entend conquérir de nouveaux territoires géographiques (Amérique Latine…) et se renforcer en dehors de l’Asie où il est né : d’ici à 2016, des ouvertures sont prévues à Sainte Lucie, en République Dominicaine, en Colombie, au Bhoutan, en Chine fin 2013 (visuel du dessous) mais aussi en France à Megève (décembre 2014). «Toute ouverture d’hôtel et de resort sera assortie d’un spa, cela fait partie de la signature Six Senses», indique-t-elle.

Par ailleurs, après avoir imposé sa marque de fabrique dans ses resorts & spas et ses spas, la stratégie de développement de Six Senses passe désormais par l’ouverture d’hôtels et par son déploiement en milieu urbain. Après Barcelone, Londres, Paris, etc., des négociations sont en cours pour s’implanter dans d’autres grandes villes par le biais de spas indépendants, de clubs, d’hôtels… «Nous venons d’inaugurer un spa à Bangkok au sein du Pacific City Club. Nous avons aussi un projet à Macao et nous visons New-York, Londres, Berlin…».

Parallèlement à cette offensive qui s’accompagne d’une nouvelle identité et d’un nouveau nom, Six Senses Hotels, Resorts and Spas, un travail de fond est en cours dans le domaine du spa. Objectif poursuivi : répondre aux grandes tendances du marché identifiées par le groupe – l’anti-aging, l’aspiration au bien-être global (nutritionnel, corporel, psychologique…), le retour à la lenteur (mouvement Slow), le besoin de reconnexion –, tout en adaptant l’offre à chaque lieu et à chaque typologie de spa. «Les gens ne veulent plus vivre la même expérience partout », note la spécialiste. Avant de poursuivre : «on sent que les clients sont en attente d’une véritable prise en charge personnalisée et d’un suivi au quotidien, chez eux. A nous d’établir des relations de confiance et de proposer des programmes de soins adaptés à chaque endroit et à chaque personne».

Cette analyse approfondie du marché s’est soldée par la conception de programmes anti-aging, fondés sur l’établissement de diagnostics poussés et sur les principes de la médecine intégrative, qui seront introduits progressivement dans les spas. Plusieurs programmes de soins ont également été conçus autour du yoga – detox & yoga, sommeil & yoga… Ils seront bientôt lancés dans les espaces bien-être proposant des cours de yoga, soit 80% des établissements. Par ailleurs, la volonté du groupe de s’implanter dans les villes a donné naissance à un concept de city spa. «Les besoins des clients ne sont pas les mêmes dans un city spa et dans un spa de destination», rappelle-t-elle. Celui-ci n’a pas encore été dévoilé. Mais il doit accorder une place plus large aux soins esthétiques, à la manucurie, aux épilations, aux conseils en nutrition, etc. ainsi qu’à des programmes destinés à accompagner et à fidéliser les clients.

Le spa Six Senses de Paris a déjà commencé à faire évoluer son offre dans ce sens (visuels ci-contre). Depuis quelques semaines, un partenariat a en effet été noué avec les marques de cosmétique Sothys et Amala, une griffe allemande certifiée Natrue, en lieu et place de la marque naturelle britannique Aromatherapy Associates.

«Sothys n’est certes pas une marque bio mais il y avait une forte demande de la clientèle pour des soins visage efficaces et bénéficiant d’une notoriété. Depuis que nous avons changé notre carte, le chiffre d’affaires retail et soins a explosé. Notre clientèle locale apprécie la marque Sothys et la clientèle étrangère aime repartir avec un produit français», explique Mélina Pourcel, la directrice du spa parisien, qui est partenaire de l’hôtel Westin. Par ailleurs, l’espace boutique s’est ouvert à de nouveaux produits, les bougies Emmanuel Levain par exemple. Il devrait continuer à étoffer son offre afin de générer du business additionnel et de contribuer au chiffre d’affaires de ce spa au design véritablement extra-ordinaire.

Tous ces changements impliquent des investissements importants, notamment dans la formation du personnel. «Nous allons doubler notre équipe de formation dans les six prochains mois pour améliorer la formation de nos équipes», annonce Anna Bjurstam. Le groupe Six Senses envisage également d’avoir sa propre école. Basée à Bangkok, la marque Six Senses a été créée en 1996 par Sonu Shiydasani. Elle compte aujourd’hui 7 Six Senses resorts & spas, 3 Evason resorts & spas et 20 Six Senses spas.

Anne Autret