Encore quelques mois de travaux et les thermes d’Evaux (orientations : rhumatologie, phlébologie, gynécologie) resplendiront d’une seconde jeunesse dans leur écrin de verdure, au coeur des Combrailles. Exploités via une SEM contrôlée par la Ville, le Département et la Banque des Territoires (plus quelques petits actionnaires privés), les thermes d’Evaux constituent un pilier de la vie économique dans cette partie de la Creuse. Et après plus de deux ans de travaux, ils devraient bientôt retrouver de leur lustre pour « aimanter » vers la cité thermale, curistes et touristes de passage dans la région limousine.

C’est en tout cas l’objectif affiché par la commune d’Evaux et Jean Monteiro, le directeur général du site – venu du groupe Arenadour. « L’historique du projet remonte à 2017, avec le lancement du Plan Particulier pour la Creuse décidé par l’Etat, afin de revitaliser la vie économique du département. Le lieu est exceptionnel, il s’agit d’un environnement propice au bien-être et à une prise en charge individuelle. Au-delà de la rénovation, nous avons des projets pour dynamiser l’activité thermale. Mais nous avons besoin de marcher sur les deux jambes : d’un point de vue économique, la partie loisirs et bien-être de l’établissement va subventionner la partie santé », explique le dirigeant.

Huit millions d’euros : c’est le montant qui a été dégagé, afin de financer le renouveau du site et lui redonner de l’attractivité. Environ 5 millions d’euros ont été accordés par l’Etat (1,750 M€), les collectivités territoriales et la Banque des Territoires, le solde provenant d’un emprunt. Le chantier a démarré en 2021 et devrait se terminer à l’automne prochain. Le spa Evahona ? Réhabilité en 2010, il était sous-dimensionné et ne pouvait accueillir que 50 personnes en simultané : insuffisant pour amortir le coût des travaux, explique Jean Monteiro. L’hôtel et le restaurant ? Frappés de vétusté, il fallait tout simplement les restaurer de fond en comble pour redonner ses lettres de noblesse au bâtiment édifié au 19ème siècle, comme beaucoup d’établissements thermaux en France. De fait, seule la partie thermale échappe à ce grand lifting et fait l’objet de travaux d’amélioration chaque année, pour accueillir les quelque 3000 curistes conventionnés qui fréquentent la station en temps ordinaire (chiffre 2019).

Côté spa et bien-être, tout d’abord, les travaux consistent à tripler la surface du spa Evanoha (fermé depuis deux saisons) pour étoffer ses équipements et enrichir les prestations. Création d’un nouvel accueil et de nouveaux vestiaires, augmentation du nombre de cabines de soin (7 dont 2 en duo, contre 4 auparavant), construction d’un bassin intérieur alimenté en eau thermale (avec musique submarine, lits à bulles…), d’un vaste hammam, de deux saunas (traditionnel et herbal), rénovation du vaste bassin extérieur… Lorsque l’espace bien-être « new look » sera finalisé, il occupera une surface de 1000 m² au lieu de 350 m² précédemment : de quoi drainer touristes et population locale et régionale. « Nous avons pris un retard de six mois sur les travaux car en rénovant notre piscine extérieure, nous sommes tombés sur des thermes romains vieux de 2000 ans », détaille-t-il. Sauf contretemps, sa réouverture est prévue en octobre 2023. Une nouvelle alternative, dans la région, aux centres de bien-être voisins : les thermes de Néris et le spa les Nériades sont à 30 mn en voiture, le centre Royatonic de Royat à une petite heure.

Côté hébergement et restauration, les 81 chambres de l’hôtel sont en cours de transformation pour se muer en 55 chambres et 17 appartements (avec liaison en peignoir), afin de privilégier les volumes et de diversifier l’offre. Une fois réhabilité, l’établissement sera affilié à The Originals Hotels et commercialisé à la marque The Originals Relais : un 4 étoiles de charme aux prix raisonnables, assure Jean Monteiro. Après une première phase de travaux en 2021, le Grand Hôtel et son restaurant (90 couverts + 60 couverts en terrasse) ont vu leurs travaux se poursuivre en 2022, pour une réouverture prévue en mars ou avril 2023. Au fur et à mesure de leur avancée, des trésors architecturaux ont été découverts, comme deux poutres Eiffel et des poteaux en fonte datant du 19ème siècle : autant d’éléments désormais mis en valeur dans la nouvelle décoration inspirée de l’Art Déco. « Au restaurant, l’accent sera mis sur la cuisine locale et le bio, nous avons l’intention de créer un potager. Nous proposerons également des menus ciblés suivant les pathologies », précise-t-il.

Au-delà de la rénovation du site thermal, une vaste réflexion est également en cours aux thermes d’Evaux-Les-Bains, afin de mettre en place un projet de santé intégrative, comprenant une prise en charge globale de la personne – hors cure conventionnée de 18 jours. « C’est fondamental à l’heure post-Covid », estime le dirigeant. Dans la ligne de mire : les actifs et les personnes en errance thérapeutique souffrant de douleurs, de fibromyalgie et autres troubles susceptibles d’être traités à Evaux. Pour ce faire, l’établissement peut d’ores et déjà s’appuyer sur ses professionnels de santé et sur les différentes « activités santé » proposées à Evaux, en complément des soins thermaux :  Qi Gong, aquasports, marche nordique, réflexologie plantaire, méditation, sophrologie, médecine traditionnelle chinoise… De nombreux acteurs sont sollicités (professionnels de santé, ARS, mutuelles, intervenants spécialisés dans le bien-être, milieu associatif…), et une étude de neuf mois, coordonnée par un médecin, a été lancée. Elle sera soumise à évaluation, une fois arrivée à son terme. En l’absence de prise en charge par la sécurité sociale, le modèle économique reste à trouver.

Ce n’est pas tout : un programme d’ETP (Education Thérapeutique du Patient) centré sur l’endométriose est également en cours de finalisation, pour une mise en place en 2023. «A Evaux, notre patientèle est féminine à 80%, et elle se rajeunit de plus en plus, du fait notamment d’une demande croissante de femmes souffrant d’endométriose », fait observer le dirigeant. De la même façon, à la suite d’études concluantes réalisées sur les propriétés de l‘eau thermale d’Evaux, l’établissement s’est lancé dans une procédure d’obtention de l’agrément dermatologie. Le dirigeant espère la décrocher d’ici à deux ans. « Les blessés de guerre de 14-18 étaient soignés à Evaux », rappelle-t-il. Autant de pistes pour élargir le champ d’expertise des thermes et capter de nouveaux curistes/clients. Sans oublier le projet à l’étude de centre de vacances aidants-aidés porté par la Mairie d’Evaux, auquel les thermes seront associés s’il voit le jour.

En 2019, les thermes d’Evaux ont enregistré un chiffre d’affaires d’environ 2,3 millions d’euros (dont près d’un million pour l’hôtel et le spa) et accueilli quelque 3000 curistes. « La moitié de notre clientèle santé et bien-être vient des environs d’Evaux, jusqu’à Limoges, et le reste de l’Ouest de la France, du Nord, de la région de Lyon », indique-t-il. Grâce au vaste chantier entrepris, l’objectif est d’atteindre 3,2 millions d’euros en 2025, dont 2,4 millions d’euros générés par l’activité santé.

Anne Autret (Crédit photos : ©Ludovic Combe)